Wolters Kluwer annonce la parution dans sa gamme Liaisons Sociales de la 30e édition de Droit du travail Droit vivant par Jean-Emmanuel Ray. L’ouvrage intègre les nouvelles évolutions législatives (activité partielle, nouvelles compétences environnementales du CSE …) et jurisprudentielles (télétravail, rupture d’essai, forfait-jours, harcèlement managérial …). L’auteur, professeur à l’Ecole de Droit de Paris I – Sorbonne et à Sciences Po Paris – souligne cette année les défis juridiques et sociaux du travail à distance mis en place avec la pandémie et appelé à se pérenniser.
Délibérément accessible au non-spécialiste, cet ouvrage veut faire connaître, mais surtout comprendre de l’intérieur, cette matière passionnante qu’est le droit du travail d’aujourd’hui.
Consacré à la relation individuelle (embauche, exécution, ruptures) puis aux rapports collectifs de travail récemment bouleversés par la disparition de nos bons vieux délégués du personnel au profit de l’unique « comité social et économique », Droit du travail Droit vivant a bien sûr intégré les derniers textes légaux : ainsi des textes de 2021 sur l’activité partielle, ou les nouvelles compétences environnementales du CSE.
Car entre 2018 et 2021, le Code du travail a été refondé, donnant priorité à l’accord d’entreprise sur la branche, redéfinissant le motif économique de licenciement, libérant (un peu) le télétravail ou encourageant les restructurations à froid avec le rude accord de performance collective.
Sans bien sûr oublier les évolutions jurisprudentielles les plus récentes : télétravail (CS, 17 février 2021), rupture d’essai, forfait-jours (CS, 6 janvier 2021), harcèlement managérial, astreinte sur portable (CS, 20 janvier 2021), rupture conventionnelle homologuée, démission (CS, 3 mars 2021), rôle du CSE en cas de licenciements économiques …
Ce chapitre commente le « Bien fâcheux télescopage télétravail à domicile / Contrôle de la durée du travail » :
« N’en déplaise aux doloristes soucieux de pérenniser la malédiction divine, évitons d’associer l’inutile au désagréable en contraignant (officiellement, sinon hypocritement) le salarié à son domicile à respecter les horaires rigides issus de la chaîne de production d’une Ford T noire, le privant ainsi de l’essentiel des avantages de ce mode d’organisation : de très appréciées marges de manœuvre. Comme le notait le Parlement européen le 21 janvier 2021 : « Il convient d’assurer aux travailleurs concernés une certaine autonomie, une certaine flexibilité et un certain respect de leur souveraineté en matière d’utilisation du temps ». Allons donc ! Pas tout le monde pareil, au même endroit et au même moment ? La rupture de l’égalité à la française : horreur et damnation (…).
Le problème aujourd'hui ? L’opposition croissante entre la réalité du travail au domicile – qui ne touche certes, au mieux, qu’un salarié sur trois – et nos règles, à la fois de preuve et de fond, relatives aux durées du travail et de repos s’agissant de collaborateurs largement autonomes, et travaillant de plus en plus souvent, voire à temps plein dans le temple de l’intimité de leur vie privée, leur domicile où personne ne peut avoir accès sans leur accord exprès, et à l’abri des regards des tiers (même en visioconférence) (…).
Lorsqu’un droit devient dans les faits inapplicable pour un employeur de bonne foi, avec de lourdes sanctions civiles (CS, 17 févr. 2021 : 348 000 euros de rattrapage salarial) voire pénales (travail dissimulé), il cherche à éviter l’obstacle.
Soit en faisant travailler des salariés hors UE : de Londres à Bengalore. Soit en n’embauchant plus de télétravailleurs salariés mais des free-lances, au coût global nettement moins élevé.
Pleurnicher sur l’uberisation du droit du travail ? Mais la faute de la victime ?
A l’instar du forfait-jours de l’an 2000 ayant constitué une solution astucieuse et équitable après le constat de l’impossibilité de calculer à la minute près la durée du travail d’un cadre autonome, il nous faut sécuriser un système équivalent lorsque le lieu de travail devient hybride. Pour ne pas entrer dans l’avenir à reculons. »
L’auteur : Jean-Emmanuel RAY est professeur à l’Ecole de Droit de Paris I – Sorbonne où il dirige le Master professionnel en apprentissage « Développement des Ressources Humaines et Droit social », et à Sciences Po Paris
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