Article rédigé par Claire Abate – Avocat à la Cour – AC Legal Avocat
Le contrat de travail se définit comme une convention par laquelle une personne s’engage à travailler pour le compte d’une autre moyennant rémunération et sous sa subordination. La subordination se caractérise, selon la Cour de cassation, par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Appliquée à l’économie collaborative, cette définition du lien de subordination, qui caractérise le contrat de travail, est source d’incertitudes. La frontière entre contrat de travail et contrat de prestation de services est parfois floue.
L’enjeu pour le donneur d’ordres, plateforme numérique, est de satisfaire, d’une part, les besoins en flexibilité de ses clients et, d’autre part, de restreindre les charges sociales pour accroître sa rentabilité. Pour le prestataire de services, généralement un particulier, l’intérêt est de n’avoir aucun lien hiérarchique avec l’entreprise donneuse d’ordres. Il jouit d’une certaine liberté dans l’organisation de son temps de travail et peut cumuler plusieurs emplois en même temps.
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 9 novembre dernier est, concernant la société Deliveroo, inédit. La Cour a jugé que le coursier « manque à rapporter la preuve qu’il fournissait des prestations à la société DELIVEROO France dans des conditions le plaçant dans un lien de subordination à l’égard de celle-ci, et spécialement dans un lien de subordination juridique permanent. ». Appréciant les faits de l’espèce de manière très concrète, la Cour a retenu un faisceau d’indices pour reconnaître le statut de travailleur indépendant d’un coursier de la société Deliveroo :
Après une série d’arrêts sur l’économie collaborative où les juridictions françaises comme européennes ont procédé à une requalification en contrat de travail, cet arrêt semble heureusement remettre les pendules à l’heure. En effet, cette décision s’inscrit dans la lignée de la loi du 8 août 2016 intégrée au Code du travail sous les articles L. 7341-1 et suivants dédiés aux travailleurs indépendants recourant pour l’exercice de leur activité professionnelle à une ou plusieurs plateformes de mise en relation par voie électronique et du jugement rendu le 14 novembre dernier outre-Manche par le Comité central d’arbitrage de Londres (équivalent du Conseil de prud’hommes), qui avait reconnu le statut de travailleur indépendant de plusieurs coursiers de la société Deliveroo.
Affaire à suivre… puisque la Cour d’appel a renvoyé l’affaire devant le Tribunal de commerce pour un jugement au fond. Le travailleur indépendant pourra néanmoins, s’il le souhaite, contester la décision de la Cour d’appel et se pourvoir en cassation pour contester la compétence matérielle du Tribunal de commerce.
Article rédigé par Claire Abate – Avocat à la Cour – AC Legal Avocat
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